A l'occasion de la sortie de "Saccharoses", son premier roman choral au ton désabusé et volontairement provocateur, le jeune auteur s'est confié à l'Officiel

Quel est votre parcours, et comment l&#39;id&eacute;e de &quot;Saccharoses&quot;&nbsp; a t-elle germ&eacute;?

J&rsquo;ai grandi en banlieue lyonnaise. &Eacute;tudes scientifiques parce que &ldquo;pas de d&eacute;bouch&eacute;s pour les litt&eacute;raires&quot;. J&rsquo;ai l&acirc;ch&eacute; les sciences apr&egrave;s la Fac pour une &Eacute;cole de commerce &agrave; Bordeaux (je croyais que la Chimie c&rsquo;&eacute;tait inventer des poisons et des philtres d&rsquo;amour... personne ne m&rsquo;avait parl&eacute;&nbsp;d&rsquo;&eacute;quations &agrave; &eacute;quilibrer et d&rsquo;osmom&eacute;trie). Apr&egrave;s une premi&egrave;re expatriation &agrave; New York, j&rsquo;ai repris mes &eacute;tudes &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; d&rsquo;Oxford. New York &agrave; nouveau o&ugrave; j&rsquo;ai d&eacute;couvert l&#39;univers de la tech.&nbsp;Je suis rentr&eacute; en Europe pour affiner mon projet de startup. &Agrave; Londres d&rsquo;abord, avant de poser mes valises &agrave; Paris.&nbsp;

&Agrave; New York, j&rsquo;ai vu ce que la Finance pouvait produire de pire. C&rsquo;est &agrave; ce moment que j&rsquo;ai commenc&eacute; &agrave; &eacute;crire. D&rsquo;abord parce que ma langue maternelle me manquait terriblement. Ensuite, pour figer des images qui me hantent. J&rsquo;ai des flashs de choses vues, ado. Peut-&ecirc;tre r&ecirc;v&eacute;es, souvent issues des mangas. Saccharoses est n&eacute; de la collision de deux &eacute;lements: mon exp&eacute;rience new-yorkaise et l&rsquo;image d&rsquo;une tarentule parcourant le sein d&rsquo;une femme dans le manga Shigurui.

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Vous proposez un r&eacute;cit assez noir et politiquement incorrect, qui fait parfois &eacute;cho &agrave; American Psycho de Bret Easton Ellis&nbsp;dans une version plus contemporaine et desanchant&eacute;e. Une volont&eacute; manifeste de se&nbsp;d&eacute;marquer de l&rsquo;air du temps?

Sans vouloir ressortir les poncifs de la catharsis aristot&eacute;licienne, je pense que la literature sert &agrave; &ccedil;a. Exorciser ses d&eacute;mons. C&rsquo;est d&rsquo;ailleurs ce que dit l&rsquo;un des trois personnages de Saccharoses, celui de l&rsquo;ex-&eacute;crivain quand il cite l&rsquo;&Eacute;vangile.

J&rsquo;assume compl&egrave;tement le politiquement incorrect. La violence. Le sang. On ne fait pas de litt&eacute;rature avec de bons sentiments. Ce qui m&rsquo;int&eacute;resse dans la violence, c&rsquo;est celle qu&rsquo;on ne suspecte pas. Ou celle que l&rsquo;on refuse de voir. Takeshi Kitano a dit un truc tr&egrave;s vrai: l&rsquo;humour, dans ce qu&rsquo;il de plus inattendu, peut &ecirc;tre une forme de violence. La th&egrave;se souterraine de Saccharoses, c&rsquo;est que la beaut&eacute; est aussi une forme de violence. Plus sournoise que toutes les autres. Elle est une louve recouverte de peaux de brebis.

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Comment avez vous nourri votre inspiration pour imaginer vos personnages ? Sans rien d&eacute;voiler de l&#39;intrigue, &quot;Bonbon&quot; existe t-elle vraiment?

Tous mes personnages sont des patchworks d&rsquo;individus rencontr&eacute;s dans la vraie vie, dans des films ou des mangas. Par exemple, y a un peu de C18 dans Bonbon. La Cyborg de Dragon Ball Z aussi jolie qu&rsquo;elle est cruelle et indiff&eacute;rente. Ce qui est certain c&rsquo;est que le personnage de Bonbon fascine. Tous et toutes veulent savoir si elle existe r&eacute;ellement. Tous et toutes sont r&eacute;partis d&eacute;sabus&eacute;s quand je leur ai dit qu&rsquo;elle n&rsquo;&eacute;tait que le fruit de ma&nbsp;impure imagination. Alors un jour, par jeu, j&rsquo;ai parcouru Instagram pendant des heures &agrave; la recherche d&rsquo;une fille qui aurait pu &ecirc;tre Bonbon. J&rsquo;ai fini par trouver et quand je l&rsquo;ai montr&eacute;e &agrave; ceux et celles qui m&rsquo;ont pos&eacute; la question, tous, sans exception se sont montr&eacute;s d&eacute;&ccedil;us.

Et c&rsquo;est l&agrave; une des grandes forces de la litt&eacute;rature. Celle de s&rsquo;approprier les personnages. De les faire sien. Nul autre art n&rsquo;est capable d&rsquo;une telle chose. La Margot Robbie du Loup de Wall Street est la m&ecirc;me pour tous. La Kim Basinger de neuf semaines et demi est la m&ecirc;me pour tous. Mais il y a autant de Bonbons qu&rsquo;il y a de lecteurs et lectrices de Saccharoses.

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Saccharoses&nbsp;par Samir aux Editions Lattes, collection La Grenade

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